LÉA Réseau écoles-collèges Maine-et-Loire

Le projet Phil2éc (2021-2024) est né de trois grands constats et d’un questionnement commun : d’une part celui du recul global des pratiques d’écriture (CNESCO, 2018) ; d’autre part, et paradoxalement, du sentiment d’inflation de l’oralité (sans remettre en cause son importance) – en particulier en EMC – et du manque de transférabilité des compétences acquises ; enfin, des difficultés rencontrées dans la mise en place de la liaison école/collège.

Cette recherche collaborative dans le cadre d'un LéA-IFÉ a engagé pendant trois ans une équipe de 10 professionnels : 3 professeurs des écoles de classes de CM1/CM2 ; 3 professeurs de français en 6ème des collèges de secteur ; 2 conseillers pédagogiques ; 1 professeure de philosophie de Terminale ; et un chercheur (laboratoire du CREN, Nantes Université). L'investigation a porté sur les conditions de possibilité d’un enseignement-apprentissage de l’écriture philosophique au cycle 3.

Des outils et des dispositifs favorisant les postures réflexive et créative des élèves (Bucheton, 2002, 2014 et 2019) ont été développées, au service d’une démocratisation de l'accès à la philosophie. Il s'agissait à la fois d'apprendre aux élèves à faire usage de l'écriture pour philosopher et à produire des textes dans la perspective des attendus institutionnels (dissertation, commentaire de texte, essai).

Cette recherche, labellisée par la chaire UNESCO de philosophie avec les enfants, s’est intéressée aux pratiques philosophiques et spécifiquement de l’écriture philosophique au cycle 3. La question de recherche était : comment favoriser l’écriture dans le cadre des ateliers de philosophie et comment développer des compétences en écriture à visée philosophique dès le cycle 3 (CM1-CM2-6ème), au service de compétences génériques ?

1. Une recherche qualitative dans une perspective phénoménologique
Étant donné le mode de travail adopté (narration des situations vécues avec les élèves et analyse commune à partir de ces situations), la recherche s'est située dans une perspective phénoménologique. L’approche est qualitative. Des cohortes ont été accompagnées du CM1 à la 6ème.
La démarche n’a pas été celle d’une amélioration par boucles itératives mais plutôt de tentatives successives permettant d’identifier peu à peu, de façon contextualisée, les leviers et les obstacles propres à chaque scénario et de dégager ainsi les conditions de possibilité. Les enseignants étaient seuls en classe lors des expérimentations, rarement observés, le chercheur intervenant ponctuellement pour mener des discussions de type DVDP ou CRP. Chaque praticien, libre de ses choix, tout en s’inscrivant dans l’esprit d’une trame définie collectivement, ne mettait donc pas en œuvre une séquence unique : la temporalité, la longueur et la thématique retenue, l’organisation interne et la nature des outils testés pouvaient varier d’une classe à l’autre, permettant de répondre aux préoccupations, au contexte et au profil de chacun.

2. Des outils d’analyse pluriels des écrits d’élèves
Les outils d’analyse étaient au carrefour de deux principaux champs de recherche :
- Des éléments tirés de la didactique du philosopher (Lipman, 2011 ; Tozzi, 2011 ; Galichet, 2019).
- Des éléments tirés des théories de l’analyse du discours (Bucheton, 2002 ; 2014).
Le groupe de recherche s'est principalement référé au modèle du « sujet écrivant » et de l'écriture réflexive (Chabanne et Bucheton, 2002 ; Bucheton, 2014).

3. Étapes de la recherche :
Il s’agissait concrètement de :
- Co-élaborer un programme d’intervention respectant les postulats établis par le collectif du LéA au début de la recherche.
- Mettre en œuvre des dispositifs variés en classe, articulant pratique de l’oral et pratique de l’écrit, pour faire écrire différents types de textes à visée philosophique, et in fine des textes favorisant l’entrée dans l’exercice académique de la dissertation.
- Analyser les données en séminaire et lors d’actions de formations inter-degrés.
L’équipe collaborative s’est réunie toutes les cinq semaines en moyenne, sur une demi-journée, à l’INSPE d’Angers. Ce qui a permis au final de tester trois à quatre modules (ou séquences) par an, représentant quinze à trente séances par classe (entre septembre et juin de chaque année), installant cet enseignement dans la durée.
La production a été le fruit d’une démarche conjointe jusqu’au bout du processus collaboratif. Cela a permis de façon remarquable à tous les membres de produire et communiquer des résultats : co-présentations lors de colloques et de journées d’étude (RNPP, 2023 ; Rencontres internationales des LéA-IFÉ, 2022, 2023 et 2024 ; Clefs de l’éducation, 2023) ; conférences en ligne (CREN-CARDIE, 2022 ; CANOPé, 2024 ; D-Phi, 2024) ; co-encadrement de formations de circonscriptions et auprès de formateurs (DSDEN 49, 2023 et 2024) ; production de matériel didactique sous la forme de fiches de séquences commentées et de fiches outils, rassemblées sur ce site  ; publication de billets de blog du LéA ; production d’articles sur le site de l’IFÉ et dans la revue d’interface Diotime ; production d’un mémoire dans le cadre du diplôme Universitaire de philosophie avec les enfants de l’université de Nantes (Picard, 2023) ; co-production et présentation de posters scientifiques

4. Principaux résultats obtenus :
Au terme de trois années de recherche collaborative, un certain nombre de leviers et de freins ont émergé à travers l’élaboration, l’expérimentation et l’analyse de modules co-construits lors des séminaires.
Le travail de co-situation de l’objet « écriture philosophique » a permis d’en dégager les principales caractéristiques. Une variété d’outils facilitateurs de l’enseignement ont été produits, dont des fiches séquences et des dispositifs d’écriture originaux. Un guide d’aide à l’élaboration de séquence a été pensé, qui reste perfectible. Un scénario plus ou moins « ritualisé » a émergé, autour de quelques invariants qui se sont révélés vecteurs d’apprentissage de l’écriture philosophique : à partir d’un thème, il s’agit d’articuler des moments individuels d’écriture libre et de réécriture planifiée, autour de phases interprétatives favorisant la problématisation, d’enquêtes menées en dehors de la classe (pratique de l’interview avec prise de notes), de lectures (philosophiques et littéraires) pour nourrir la réflexion, de pratiques de la discussion réglée, et de moments collectifs collaboratifs de métadiscursivité : cercles d’auteurs, commentaires écrits sur les textes des pairs, échanges autour des productions, les modules s’étalant sur sept à onze séances.

Si le LéA n’avait pas pour but premier la transformation des pratiques enseignantes, il s’est finalement révélé formateur à plus d’un titre. Ainsi, l’un des résultats importants est que cette recherche tend à démontrer la plus-value de la philosophie pour favoriser l’émergence d’un sujet écrivant, grâce d’une part à l’effet produit sur les apprenants et d’autre part à celui sur les postures enseignantes.

Publications scientifiques


Communications scientifiques

Thèse de doctorat :

Blond-Rzewuski, O. (2025). L’enseignement de l’écriture philosophique au cycle 3 : enjeux et conditions de possibilité dans le cadre d’une recherche collaborative. [Thèse de doctorat, Nantes Université]. https://theses.fr/2025NANU2001  

Conférences invitées :



Communications sans actes dans un colloque scientifique